dimanche 6 décembre 2015

Sur la réserve

4e de couverture: Et s’il n’y avait plus de pétrole en France ?
Un matin, Ludovic tombe bêtement en panne d’essence à la sortie de son village. Rien de grave à priori, pourtant ses ennuis ne font que commencer et sa vie en sera bouleversée à tout jamais. Car la pénurie de pétrole qui paralyse le pays interdit toute faiblesse ou indolence.
Jour après jour, Ludovic raconte ses mésaventures, ses petites victoires et ses grandes médiocrités. Son monde s’écroule et il n’a rien vu venir. Personne n’a rien vu venir.
Un premier roman anticipatif écrit avec brio qui tire la sonnette d’alarme quant à notre invraisemblable dépendance à l’or noir.

Alors que depuis quelques jours,  beaucoup de  dirigeants du monde  sont réunis à  la COP21 (conférence sur le climat) à Paris, "Sur la réserve est un roman de circonstance qui tire la sonnette d'alarme. 
Carole Mijeon est parti d'une question toute bête: "Et si le pétrole venait à manquer en France, que se passerait il?" De cette question, elle tire un roman d'anticipation d'une réalité incroyable. L'époque que décrit Carole Mijeon n'est pas si lointaine que ça: c'est la nôtre, dans quelques années, si nous n'y prenons pas garde. 
J'ai beaucoup aimé ce roman, avec son personnage principal, Ludovic, qui est un homme comme vous et moi, qui s'est laissé bercé par la société de consommation et qui, cette situation venue, à commencé à voir son monde basculer et surtout, il se rend compte qu'il n'a été qu'une personne passive toute sa vie. 
Ce roman fait prendre conscience surtout que nous avons pris l'habitude de tout avoir sur un plateau, à portée de main  (les hypermarchés qui nous fournissent la nourriture toute prête, les ordinateurs et internet qui nous montrent le monde sans sortir de chez nous, et qui nous fait croire qu'on communique avec le monde entier, alors qu'on se laisse enfermer dans une bulle où il n'y a que la solitude). Car, que se passe t'il quand il n'y a plus d'essence pour acheminer les denrées alimentaires dans les hypermarchés, mais aussi le pétrole qui sert même à  nous chauffer? Eh bien, les magasins sont vides et il n'y a plus rien à manger et on crève de faim. (Et c'est là que la question sur le passé se pose: comment faisait nos ancêtres pour se nourrir avant que les supermarchés existent: ils cultivaient et élevaient eux même ce qu'ils mangeaient). 
Ludovic, notre "héros" ordinaire ouvre les yeux sur tout ça. Ludovic est un personnage attachant car c'est un être qui nous ressemble: il a des réactions normales: il s'emporte, il à peur, il n'est pas forcément courageux, mais il essaye de s'en sortir et surtout de réagir. C'est ce parcours et cette prise de conscience que Carole Mijeon met en avant dans son roman qui, par son réalisme, fait froid dans le dos, mais qui nous fait réagir. Ce roman montre également que l'on est dépendant des pays qui possèdent l'or noir ("Sur dix litres de pétrole  que chaque citoyen consomme, neuf sont importés. Tous les secteurs vitaux de nos territoires sont  totalement dépendants de cette énergie abondante, bon marché, facile à stocker, a transporter, à distribuer, à utiliser. Il suffit d'imaginer un seul bien ou service qui n'en dépende pas, pour se rendre compte qu'il n'y en pas. C'est bien ce que Ludovic aurait dû comprendre, ce que le gouvernement aurait dû lui expliquer, ce qu les élus auraient dû anticiper, mais rien de tout cela ne s'est produit." explique Benoit Thévard (ingénieur et chercheur) , dans la préface du roman): si ceux ci arrêtent de nous fournir, nous seront dans la situation décrite dans le roman. 
Voilà un livre qui, par le biais du divertissement, tire la sonnette d'alarme et fait réfléchir sur le monde d'aujourd'hui. Un roman d'utilité publique (comme le dit encore Benoit Thévard dans la préface). Carole Mijeon, par le biais de Ludovic nous éclaire sur notre avenir tel qu'il pourrait être si on ne se bouge pas. C'est passionnant, terrifiant, crédible (et c'est ça qui fait peur): un roman qui se dévore rapidement: c'est simple, quand on le commence, on ne peut plus en sortir, nous sommes piégés par la plume de Carole Mijeon et la situation qu'elle fait vivre à Ludovic, qui, j'ai oublié de le mentionner, habite dans un village...ce qui le rend encore plus proche de nous. 
Un roman à lire absolument pour prendre conscience qu'il faut bouger les choses en arrêtant cette dépendance qu'à sur nous l'or noir (qu'on utilise pour beaucoup de choses). Et je laisserai le mot de la fin à Carole Mijeon, (qui fait penser ceci  à son personnage Ludovic (puisque c'est lui, le narrateur de cette histoire)  pour vous convaincre de lire ce livre: 

"Aujourd'hui, notre boulimie est devenue vertigineuse. Plus de quatre-vingt-dix millions de barils de pétrole sont consommés chaque jour dans le monde. Ça fait plus de quatorze milliards de litres! Par jour...
La nature à mis cinq cents millions d'années à fabriquer cette huile de roche et l'homme moins de deux siècles pour presque entièrement la faire partir en fumée. (p.81)

Merci à Eric et aux Editions Daphnis et Chloé pour cette découverte déconcertante. 



Carole Mijeon: Sur la réserve, Daphnis & Chloé, 294 pages, 2015


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire