lundi 5 juin 2017

Les Dieux du tango

4e de couverture: Février 1913. Leda a dix-sept ans. Elle quitte son petit village italien pour rejoindre en Argentine son cousin Dante, qu’elle vient d’épouser. Dans ses maigres bagages, le précieux violon de son père.
Mais à son arrivée, Dante est mort. Buenos Aires n’est pas un lieu pour une jeune femme seule, de surcroît veuve et sans ressources : elle doit rentrer en Italie. Pourtant, quelque chose la retient… Leda brûle d’envie de découvrir ce nouveau monde et la musique qui fait bouillonner les quartiers chauds de la ville, le tango, l’envoûte. Passionnée par ce violon interdit aux femmes, Leda décide de prendre son destin en main. Un soir, vêtue du costume de son mari, elle part, invisible, à travers la ville.
Elle s’immerge dans le monde de la nuit, le monde du tango. Elle s’engage tout entière dans un voyage qui la mènera au bout de sa condition de femme, de son art, de la passion sous toutes ses formes, de son histoire meurtrie. Un voyage au bout d’elle-même.
Quand ma libraire me parle, lors d'une de mes nombreuses visites à la librairie, d'un de ses derniers coups de coeur et que celui ci devrait beaucoup me plaire, je n'hésité pas une seconde, je le lis dès qu'il est en ma possession. 
Et là, c'est une claque monumentale qui m'est arrivée en pleine figure! Mon dieu, quel livre, mais quel livre! 
Dès les premières pages, j'ai été happé par l'histoire de Leda, cette jeune fille de 17 ans,qui arrive en Argentine pour rejoindre son mari et cousin Dante. Sauf qu'en débarquant, elle apprend que son mari est mort. Elle n'a plus alors qu'un seul choix: retourner en Italie...sauf que la musique, et le tango en particulier va l'emporter dans un tourbillon sensuel et envoûtant qui va changer son destin. 
Au delà de l'histoire qui vous capte dès les premières minutes, c'est la plume de l'auteure que je retiendrai avant tout (et très retranscrite dans notre langue par Eva Monteilhet, sa traductrice: il se dégage une telle poésie quand elle parle du tango  et une telle sensualité dans les scènes de sexe, qui ne sonnent jamais vulgaire. Non, elle sonne comme un tango, cette musique sensuelle et charnelle entre toute, qui vous enveloppe. Les descriptions sur le tango sont tellement belles, que j'en suis resté estomaqué et que j'en aurais presque eu les larmes aux yeux. 
Les Dieux du tango n'est pas seulement un roman sur cette musique qui a su évoluer et s'adapter pour traverser les pays et le siècle, c'est également un superbe roman sur la condition féminine dans cette ville argentine: les femmes n'avaient pas le droit de jouer de la musique et surtout pas du tango...alors Leda est devenu un homme (Dante) pour pouvoir vivre sa passion pour la musique. C'est également un roman sur le renoncement de soi et la découverte de "l'amour défendu", Leda/Dante couchant avec des femmes, tout en cachant sa vraie personnalité. Ces scènes là sur le désir féminin sont les plus belles que j'ai pu lire et m'ont fasciné par leur sensualité pudique. C'était très troublant. 
La force de ce roman, c'est que, même s'il se concentre sur le parcours hors norme de Leda devenu Dante, l'auteur nous raconte le passé de chaque personnage qu'il/elle croisera: celui de Fausta, la jeune femme qui partagera sa cabine sur le bateau, Arturo, l'ami de Dante qui vient la chercher et lui annonce la mort de son cousin et mari, Ernesto, le vieil aveugle qui lui apprend à jouer du tango, Santiago, le bandoneoniste qui l'engage dans son orchestre  et même Cora, la cousine de Leda, fantôme qui traverse le roman, pour nous  raconter ses secrets. ...chacun va se dévoiler à nous en quelques pages. Même si ce procédé, m'a un peu frustré au départ, surtout concernant Fausta, car j'aurai bien voulu savoir si elle allait retrouver son mari, j'ai trouvé ce procédé intéressant car il permet de comprendre la vie de ces personnes: c'est ainsi que  l'attachement va naître entre eux et les lecteurs que nous sommes. 
Leda est un personnage des plus fascinant et complexe, qui découvre, à travers son travestissement, des sentiments et un amour lesbien qu'elle n'aurait pas connu si elle n'était pas devenu un homme. C'est très troublant,
Carolina de Robertis aiment tous ses personnages et cela se ressent dans le fait qu'elle n'en laisse aucun sur le bord de la route: elle leur donne même une conclusion à la fin de la 2e partie du roman. 
Même si dans la dernière partie, les années sont survolées, je n'ai pas ressenti une frustration, bien au contraire, cela est fluide et compréhensible. Puis, vient la fin, qui m'a laissé le coeur battant et les larmes aux yeux. 
Au final, un roman vibrant comme une corde de violon, sensuel comme la voix d'une chanteuse de tango, triste comme le son d'un bandonéon, et qui m'a touché en plein coeur. Un beau roman, sur le  tango (sans oublier les femmes) , cette musique sensuelle et cette danse charnelle, à laquelle Carolina de Robertis, rend un vibrant hommage. 
Merci à ma libraire pour m'avoir conseillé ce livre...encore une fois, elle a su touché juste pour parler à mon petit coeur de lecteur. La petite musique des Dieux du tango vibrera en moi pour longtemps. 


Carolina de Robertis: Les dieux du tango, (The Gods of Tango), Le Cherche Midi, 545 pages, 2017

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